La Gracieuse


La petite fille regarde le lac et pense à sa poupée
Julie
qui dort comme les marins
dans son hamac pendu.
Elle cherche les moutons
au creux des vagues.
Quand elle reviendra
ses pieds s'enfonceront dans le sable
et elle sentira l'odeur des arbres
qui est un peu celle du soleil.
Cette nuit elle ira voir
le bateau rangé, l'eau froide
et les voiles qui dorment.

Quand le ciel est noir
les enfants sur les bateaux voudraient être
plus vieux.
Et la fièvre du vent
ne peut troubler leur calme.
La pluie les abrite,
presque seuls, secoués.
Il y a quatre bateaux dans le gris-vert,
ils ne sont pas loin des arbres.
Pour la première fois peut-être
ils ne veulent pas rentrer.


Suzanne Aigrain, 1996